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Dans un monde contraint et incertain, le cognitif n’a pas de limite.
Le génie de l’homme va avoir dû mal à comprendre le changement progressif du climat et son impact sur la nature, s’il ne modifie pas sa manière de penser.
A l’heure où nous changeons notre smartphone tous les ans, sommes-nous encore capables de nous adapter à un monde limité ? L’adaptation est un concept issu des travaux de Darwin qui caractérise et sélectionne le vivant. A chaque changement climatique, le vivant s’est transformé et a développé des nouvelles capabilités, c’est-à-dire des libertés d’action et des capacités à faire (au sens de l’économiste Amartya Sen). Par exemple, les hominidés ont cuit leurs aliments et sont devenus sédentaires en créant une agriculture. Ces changements d’alimentation ont d’ailleurs eu un impact sur le développement de leur cerveau (Voir les travaux de Pascal PICQ, paléoanthropologue à ce sujet).
Pour expliquer et comprendre ce phénomène d’adaptation à l’environnement, plusieurs connaissances ont été produites par la paléoanthropologie, l’éthologie et la paléoclimatologie etc… Ces savoirs, nous les avons aujourd’hui. Ils ont été construits en reliant des connaissances acquises dans chaque discipline scientifique. Chaque donnée est une étape d’un processus d’apprentissage. Autrement dit, ces savoirs peuvent être assimilés à des algorithmes.
Aujourd’hui, nous devons apprendre à évoluer et travailler dans un monde limité en ressources. Notre savoir est donc en cours de construction. Savons-nous concrètement comment adapter nos activités professionnelles à ce changement climatique ? Dois-je repenser les usages numériques de mon activité, dois-je arrêter les déplacements dans mon activité ? Enfin, dans chaque organisation, accepterons-nous de ne pas savoir et de commencer à penser par hypothèse ?
Avec la révolution numérique, les humains ont développé des automatismes pour développer leurs savoirs et sont dorénavant habitués à obtenir des réponses rapides via les logiques d’un moteur de recherches. « Lutter contre le changement climatique » vous donnera certainement plusieurs réponses dans Google, mais quelles sont les solutions les plus adaptées à chaque situation ? Si vous vous fiez à celle qui figure en haut de la liste… ce sera certainement pour vous vendre un service ou un produit. La réponse commerciale ne sera pas la meilleure.
A mon sens, nous sommes toujours équipés d’un organe capable de développer de nouvelles capabilités. Dans un monde limité, nous sommes certes contraints en ressources mais le cognitif, lui, n’a pas de limite. Pour contre, il devient urgent de placer ce sujet en priorité dans les plans d’actions car la connaissance collective met du temps à s’acquérir même au siècle des lumières, où tout va vite.
Voici quatre hypothèses à expérimenter pour s’engager dans une croissance cognitive en 2023
Hypothèse 1 – Pour comprendre la complexité, passez en mode systémique
Le changement climatique est un sujet complexe comme celui de l’adaptation du vivant au temps du paléolithique. Il nécessite de relier les savoirs et les disciplines entre elles et non de les confronter les unes aux autres pour savoir qui aura raison. Dans le monde du travail, le sujet nécessite de relier les secteurs entre eux pour trouver des leviers ou des réponses. Cela s’appelle la pensée systémique. Elle consiste de partir d’un problème et de le résoudre tout en analysant les composantes de celui-ci et d’analyser les effets entre eux. par ce mode de raisonnement n’est pas inné. A l’école, nous apprenons la pensée analytique notamment avec les mathématiques et la philosophie de Descartes. Chaque problème est analysé en identifiant des causes et des conséquences. Pour des sujets comme le changement climatique et notre adaptation, nous avons besoin de changer de mode de raisonnement pour commencer sérieusement à le comprendre. Et la pensée systémique s’apprend à tous âges. (voir notre classe virtuelle)
Hypothèse 2- Développez une pédagogie interne du problème
Savoir identifier un problème s’apprend avec des méthodes d’idéation. Idéation est un terme de philosophie employé par Georges Lewes. Il signifie avoir la faculté d’avoir des idées, il illustre la formation des idées. Dans le mécanisme d’idéation, il s’agit de revenir à l’essence du problème posé. Dans nos sociétés modernes, nous avons perdu cette faculté de définir le problème car des automatismes sont apparus avec le numérique comme celui de trouver des réponses en disant « dit Google comment je fais cela ». La « pedagogia » du problème renvoie à des techniques vieilles comme le monde, comme celle de la dialectique de Socrate. Il s’agit de se questionner plusieurs fois pour explorer des définitions ou des énoncés de problèmes. Autre méthode aussi ancienne rattachée au langage est la réflexivité. Il s’agit d’objectiver le problème posé en utilisant les bons mots pour le catégoriser et le décrire. Cette compétence cognitive sert surtout à prendre du recul et améliorer des pratiques. Aujourd’hui, la réflexivité est plus connue dans une modalité formative appelée « l’AFEST ». (voir notre page à ce sujet)
Hypothèse 3 – Sortez du virtuel et du 100% numérique dans votre fonctionnement.
11% de notre temps de vie est passé au travail (Dans le passé, c’était 40%). Avec le développement de l’automatisation et l’introduction de l’intelligence artificielle dans nos pratiques professionnelles et les actes du quotidien, nous disposons de 8 fois plus de disponibilités mentales… Mais à quoi servent-elles ? A nous connecter ou nous déconnecter de la réalité ? Par exemple, pour comprendre les effets du changement climatique, il est temps de sortir des écrans et de regarder la ruralité de très près. Organisez des séminaires pédagogiques pour aller dans les campagnes non plus pour faire du team building mais pour comprendre ce qui se joue sur chacun de nos territoires. Les sujets du transport et des hydrocarbures, du stress hydrique, le sujet des inondations et l’utilité des forêts sur le climat nous concernent tous, au plan professionnel et personnel. Peut-être ne le savez-vous pas mais la pénurie d’eau en France a réellement eu lieu cet été, nous l’avons vécu dans notre village.
hypothèse 4 – Réintroduisez la motricité, non plus comme un mode de transport mais pour développer une croissance cognitive.
La motricité est très souvent associée au transport dans les organisations : par exemple prendre son vélo ou sa trottinette pour venir au travail. Elle est la plupart du temps envisagée comme un des remèdes pour améliorer de santé physique. Mais l’Histoire nous rappelle que toutes les idées géniales sont apparues en mouvement. Pourtant dans nos organisations, les hackathons ou les séminaires créatifs s’organisent dans des salles fermées. Pourquoi les réunions sont-elles organisées assises, immobiles devant un vidéo-projecteur ? Pourquoi les personnes en formation sont-elles assises encore dans la position « passager / téléspectateur » comme disait Michel Serres ? Nous savons que la marche à pied est connue pour capter l’attention et développer l’observation. La marche permet également d’organiser des dialogues de fond sur des sujets, tout en limitant leur nombre. Essayez le format des réunions « Walk and Talk » ou des séminaires à l’extérieur (voir un exemple avec nos cartes Design thinking), vous ferez des économies d’énergie…
Des solutions hypothétiques à tester en 2023
Ces quelques réflexions ne permettront certainement pas d’inverser la tendance et ne rendront peut-être pas notre monde moins contraint. Mais elles peuvent néanmoins permettre d’envisager en 2023 de placer le critère du vivant avant l’économique et de nous permettre de penser à des hypothèses de solutions sans effet néfaste pour l’avenir.